Née
en 1958. Fait partie de la jeune génération de poètes révélée par l’UDIR
et le mouvement Créolie des années 80.
Deux
recueils essentiels Au danseur de feu (1983)
et Rue d’après (éd. Ti-Kabar-ADER).
Nombreux poèmes dans les recueils collectifs et les publications de 1’ADER.
Deux
textes inédits confiés à notre recueil. Dissemblables, ils sont réunis par
la présence persistante de l’enfant, centre du récit symbolique (l’année
du Chien Fou), d’une catastrophe à la fois écologique et culturelle qui crée
une cassure entre le passé représenté par les chiens gardiens de Pagodes, les
jardins, et un présent saccagé par le passage d’un vent de révolte, de
subversions, de liberté débridée qui altère le comportement de l’enfant.
Apparition
dans la belle incantation où la poétesse-mère dans une nuit de pluie du
sommeil végétal et animal où se rejoignent fougères, orchidées aux
longues racines et l’enfant «tétard affectueux», tous confondus dans une
vie sous-jacente pleine de mystère.
Attendons
d’autres merveilles de Claire Karm.
OEuvres:
Au danseur de feu (poésie), Ed. UDIR, 1983.
Rue d’après (poésie), Ti-Kabar-Ader, 1992.
L’ANNÉE
DU CHIEN FOU A la porte, à la porte des pagodes, les chiens chinois sacrés pleurent leur infortune séculaire. Dans la vie, à la petite semaine, les mômes grandissent avec les lianes. A la porté, dans les couloirs, les jardins, les aires... Le vent dans le grand parc, le jardin du roi, crie des mots terribles et publics. Le grand parc est détruit. Le jardin des Amours, des bébés à bicyclette à l’ombre des badamiers violets. Mon
Bouddha, le plus fin, le plus décoré, le plus peint, le plus ancien mon bébé
chinois montre
les arbres tranchés, du doigt. Toutes les mangues — dragées écrasées dans la boue c’était nous, cet Amour Fou. Plein les mains, des reliques plein les mains, les mères tremblantes au seuil de tous leurs temples, osent à peine prier pour le petit dernier, si fort, si cruel, qui mord. Le vent terrible a cassé tous les ancêtres, pour vivre sa vie, si fort, dehors. Sa vie de cyclone sans douceur. Que deviennent les marmailles agrippés au ventre du Bouddha? Vont-ils noyer leurs frères dans le lac de boue, manger leurs joues? Mon
coeur~ mon tout petit coeur~ ta mère embrassait ton nombril, et ton père
serrait tes petons en une seule main. Le gredin ! Il a mangé les fruits des arbres tombés par terre. Il
tétait le meilleur lait de la mère. Un
Brahmane un
Dieu un Roi. Le
gredin. C’est un temps de cyclone. Un temps de cyclone, je te dis. Pauvre
petit. |